Pour financer son plan de relance, l’Union européenne va notamment taxer les déchets d’emballage en plastique non recyclé à compter du 1 er janvier prochain, via des « contributions nationales ». Pour la France, la facture devrait dépasser le milliard d’euros.
L’Europe avait prévenu : pour financer son grand plan de relance, elle devait trouver de nouvelles « ressources propres ». La première sera introduite dans moins de six mois, à savoir une « taxe plastique » à la charge des Etats membres, dont la France pourrait bien être le plus gros contributeur. Cette taxe, appliquée à compter du 1er janvier, sera calculée sur le poids des déchets d’emballages plastiques non recyclés « avec un taux d’appel de 80 centimes d’euro par kilogramme », assortie d’un mécanisme « pour éviter un impact trop régressif sur les contributions nationales », selon les conclusions de l’accord européen. Ce mécanisme limiterait la facture pour les pays les moins riches.
L’idée n’est pas neuve . C’est en 2018 que Bruxelles a imaginé la création de cette contribution nationale sur les emballages plastiques non recyclés. A l’époque, il s’agissait d’abord de compenser les pertes de revenus liées au Brexit et d’équilibrer le budget européen.
Tous les déchets
Si Emmanuel Macron a assuré mardi soir, sur TF1, que « ce n’est pas le contribuable qui paiera » pour le plan de relance, cette nouvelle taxe sur les déchets plastiques comme les blisters, les pots de yaourt ou les sachets de café ne serait pas négligeable pour le budget français.
La France étant un élève moyen du recyclage du plastique, elle pourrait devoir verser entre 1,3 et 1,4 milliard d’euros par an pour s’en acquitter, estime Nicolas Garnier, le directeur général de l’association des collectivités locales Amorce, en charge de la gestion des déchets. Car la taxe concernera à la fois les déchets plastiques ménagers – environ 800.000 tonnes par an ne sont pas recyclées – et les déchets non ménagers.
« C’est la première fois que nous aurons une politique aussi ambitieuse sur le plastique », estime-t-il. « Cela va obliger à se poser la question du recyclage du plastique dans son ensemble, pas uniquement celui des bouteilles », ajoute-t-il, alors que la France veut tendre vers 100 % de plastique recyclé en 2025 (le Green Deal européen veut garantir que les emballages soient réutilisables ou recyclables d’ici à 2030), et que le débat a beaucoup porté ces derniers mois sur la consigne des bouteilles en plastique.
« Qui va payer ? »
L’Etat va donc devoir payer cette contribution, mais – dans la mesure où la gestion des déchets n’est pas de sa compétence mais de celle des collectivités -, il pourrait décider d’en répercuter le coût. Qui pourrait alors supporter la charge finale ? Plusieurs hypothèses seraient envisageables, selon Nicolas Garnier, comme une répercussion vers les éco-organismes, vers leurs clients comme les collectivités locales ou vers les metteurs sur le marché (distributeurs, fabricants, etc.). Ces derniers paient déjà des contributions versées aux éco-organismes en charge de la filière recyclage (35 centimes par kilogramme d’emballage plastique aujourd’hui), qui pourraient être augmentées.
« Qui va payer ? Comment ? Cette annonce amène de nombreuses questions. Cette mesure doit être cohérente avec les autres mesures françaises ou européennes sur le plastique. Quelle est la politique publique derrière ? S’agit-il de développer le recyclage, de supprimer le plastique ? », interroge Antoine Robichon, directeur général adjoint de l’éco-organisme Citeo.
Les industriels européens de l’emballage s’opposent à l’instauration de nouvelles mesures fiscales. Ils pointent le risque de compromettre leur capacité d’investissement dans des technologies plus durables, et s’inquiètent de la non-affectation des recettes européennes vers l’amélioration des infrastructures de gestion des déchets.
Reste que, pour certaines associations environnementales, le taux d’appel de la taxe est encore « trop timide ». C’est l’avis de l’ONG Deutsche Umwelthilfe (DUH), qui salue l’annonce « attendue depuis longtemps », mais juge qu’« il est nécessaire d’avoir un prix qui provoque vraiment un changement de direction ».
Source : Les echos